[Théâtre] Hamlet – William Shakespeare / Robert Icke | Almeida Theatre

Hamlet est ma tragédie favorite de William Shakespeare. Je ne saurais expliquer pourquoi, mais c’est le cas. Après avoir été surprise par l’interprétation de David Tennant et quelque peu déçue par le Hamlet de Benedict Cumberbatch, j’étais plus qu’impatience de découvrir la version d’Andrew Scott. J’ai déjà eu la chance de voir Andrew Scott deux fois sur scène, dans Emperor & Galilean et Birdland – deux rôles diamétralement opposés dans lesquels il excellait. J’étais donc relativement enthousiaste en prenant place dans le théâtre.

Et vous savez quoi : j’ai trouvé mon Hamlet. 

J’ai adoré le Hamlet de Robert Icke, mais alors VRAIMENT adoré ! Je n’avais pas eu un tel coup de cœur pour une pièce et une mise en scène depuis The Collector l’année dernière.
Et j’en ai vu des pièces depuis le mois d’août.

Robert Icke a choisi de situer son Hamlet dans le monde moderne – un peu comme Baz Luhrman avait fait avec son Romeo + Juliet. Et ça fonctionne à la perfection : il nous prouve une fois encore à quel point les pièces de William Shakespeare sont intemporelles. L’action se situe en grande partie dans la maison du Roi Claudius, entre le salon et la salle de surveillance. Un décor assez simple mais efficace, en totale adéquation avec la mise en scène des moments forts, tels que la pièce de théâtre ou le combat entre Laertes et Hamlet. En plus d’éviter les nombreux changements de décor, cela permet aussi au spectateur de se repérer plus facilement dans l’histoire.

Robert Icke avait mis en scène 1984 pour l’Almeida Theatre il y a quelques années. On retrouve dans Hamlet certaines des idées qu’il avait eu pour l’adaptation du roman de George Orwell, notamment le fait d’utiliser des vidéos pour présenter des points de l’histoire et de filmer en direct certaines scènes. Le spectateur est totalement immergé dans la pièce et cela confère à l’ensemble un aspect plus réel et interactif.

Et puis il y a la scène entre Polonius et Hamlet, acte 2, scène 2. La fameuse scène qui m’avait tant dérangée dans la version de Lyndsey Turner : elle est PARFAITE. En tout point comme je me la représente quand je lis la pièce. Et ça c’est fabuleux.

Mais plus que le décor et la mise en scène, c’est vraiment l’interprétation des acteurs qui sublime cette pièce. Contrairement au Hamlet de Lindsey Turner, où l’on sentait beaucoup des acteurs en retrait face à Benedict Cumberbatch, ici chacun à sa place et son importance. Andrew Scott n’éclipse pas les acteurs secondaires : bien au contraire, son interprétation tout en retenue met les autres en avant.

J’ai été tout particulièrement émerveillée (oui oui, c’est le mot) par Jessica Brown-Findlay (Ophelia), Luke Thompson (Laertes) et Peter Wight (Polonius). Toutes les scènes entre le frère et la sœur, le père et la fille, le père et le fils ou tous les trois ensembles étaient touchantes et tellement représentatives des réactions et comportements que nous avons au quotidien, dans le monde réel. On sent tout l’amour et le respect qu’ils ont les uns pour les autres, la complicité entre Ophelia et Laertes – j’étais littéralement subjuguée par leur naturel. J’ai une profonde affection pour le Polonius de Peter Wright, ce père qui ne pense qu’au bien de ses enfants et si attentionné envers Hamlet.

Jessica Brown-Findlay est une parfaite Ophelia. J’ai aimé sa joie de vivre et son insouciance, son amour pour son frère et son père, son attachement pour Hamlet et sa force de caractère aussi. Elle n’est pas présentée comme une jeune fille renfermée, prisonnière des circonstances et d’un amour non réciproque. Sa folie n’est pas que le résultat d’un cœur brisé, mais d’un profond désespoir face à la perte de son père. Sa mort tient plus d’une absence de volonté pour vivre que d’une réelle envie de mourir. Et la scène où elle arrive sanglée dans son fauteuil roulant parce qu’elle n’a plus la force morale et physique pour marcher ni parler en est l’évidence même.

Angus Wright est un Claudius froid, conscient de sa faute, mais sans empathie aucune et sans grande affection pour Hamlet. Juliet Stevenson interprète une Gertrude amoureuse mais pas aveugle pour autant, elle croit son fils et se rend compte que son nouveau mari a des choses à cacher.

Et puis il y a Andrew Scott. Parfait Hamlet. Un Hamlet tel que je me l’imaginais. Intelligent, sarcastique, stratège, amoureux, amical. Un Hamlet désespéré et désemparé, qui a énormément de mal à se remettre de la mort de son père et du remariage de sa mère. Par un sourire en coin, un haussement d’épaules, une remarque sarcastique, il fait passer toute sa colère et son découragement. Subtilement. Cette subtilité qui faisait tant défaut dans d’autres versions.

La pièce dure 3h45 en comptant les deux entractes, mais on ne voit pas le temps passer tellement on est captivés par tout ce qu’il se passe sur scène. Je suis ressortie du théâtre avec un sourire béat et l’envie irrépressible d’ y retourner. Ce sera chose fait en juillet et vous n’imaginez pas à quel point j’ai hâte !

Hamlet de William Shakespeare
Mis en scène par Robert Icke.
Avec : Andrew Scott, Jessica Brown Findlay, Luke Thompson, Angus Wright, Peter Wight, Juliet Stevenson…
Jusqu’au 22 avril 2017 à l’Almeida Theatre.
Du 9 juin au 2 septembre 2017 à l’Harold Pinter Theatre

© Photos : Manuel Harlan

2 Comments

  1. Voilà une critique qui donne très envie d’aller découvrir ce spectacle ! Malheureusement je ne pense pas qu’il passe par mes environs (Toulouse)…

  2. oh j’avais adore la version avec Benedict…mais lala tu me donnes l’eau a la bouche…en esperant que cela passe au NTL, plus qu’a esperer (http://ntlive.nationaltheatre.org.uk/)

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